Becker choque le monde : pourquoi remporter Wimbledon à 17 ans a été une malédiction

Le poids d’une victoire précoce
En juillet 1985, un jeune prodige de 17 ans secouait le monde du tennis en dominantses adversaires à Wimbledon. Boris Becker est le plus jeune champion de l’All England Club depuis l’ère Open, un exploit retentissant qu’il remporta sur Kevin Curren en finale. Cinquante ans plus tard, l’Allemand confesse un sentiment inattendu : « Je regrette d’avoir gagné Wimbledon à 17 ans. J’étais encore un enfant. » Cette victoire fulgurante, loin de lui apporter la sérénité, l’a propulsé sous les feux médiatiques d’un sport en quête de nouveaux héros.
Un chemin semé d’embûches
Après son sacre inaugural, Becker signa deux autres titres à Wimbledon (1986 et 1989), mais il ne réussit jamais à en faire une ascension tranquille. Le sentiment d’« être trop privilégié » et l’absence de refus ont nourri chez lui un mal-être tenace. « Tout devenait un cas planétaire : où que j’aille, quoi que je fasse, on en parlait », explique-t-il. Cette pression constante, associée à des moyens financiers colossaux, a forgé selon lui « la recette du désastre » : un manque d’ancrage, et l’impossibilité d’apprendre à dire non.
Analyse technique : l’évolution du jeu de Becker
Si le « Kid » fit sensation par son service foudroyant et sa volée agressive, son style a évolué au fil de sa carrière :
- Service lifté et sautillé : Becker utilisait sa flexion de jambes pour générer une trajectoire imprévisible, déstabilisant ses adversaires dès le premier coup.
- Volée nerveuse : sa coordination main-œil exceptionnelle lui permettait de prendre la balle très tôt au filet, dictant le jeu avec autorité.
- Coup droit explosif : même s’il restait un joueur de montée, Becker pouvait déborder ses rivaux depuis la ligne de fond grâce à un revers à deux mains solide.
- Mental de guerrier : confronté à l’adversité, il développait une attitude combative, parfois trop agressive, qui lui valut autant de succès que de critiques.
Ces armes techniques, alliées à une condition physique hors norme, firent de lui un modèle pour les générations suivantes. Cependant, la précocité de ses succès a laissé peu de temps à Becker pour développer un équilibre hors du court.
Leçons pour les jeunes talents
L’expérience de Becker offre plusieurs enseignements pour les espoirs du tennis :
- Prendre le temps de mûrir : l’éclosion sous les projecteurs ne doit pas précipiter la vie personnelle et la gestion des émotions.
- Construire un entourage solide : un coach, un mentor et des proches capables de dire « non » sont indispensables pour garder les pieds sur terre.
- Varier les expériences : alterner compétitions, stages et moments de déconnexion permet de préserver l’envie de jouer et d’apprendre.
- Se former à la gestion financière : anticiper la célébrité et les revenus permet d’éviter les faux pas économiques et juridiques.
La gestion de la notoriété
Au-delà des coups de raquette, Becker a dû affronter des tempêtes personnelles et légales : dettes dissimulées, faillites, puis une condamnation en 2022 pour avoir dissimulé 2,5 millions de livres sterling. Huit mois de prison en Angleterre, suivis de l’expulsion, illustrent la descente aux enfers d’un champion mal préparé aux obligations hors du court. « Vous ne pouvez pas changer le passé, mais vous pouvez changer l’avenir », conclut-il, conscient que la responsabilité est le seul chemin vers la reconstruction.
Conseils d’un ancien joueur
En tant qu’ancien classé -2/6, j’ai moi-même expérimenté le stress des premiers tournois et la pression de la performance. Pour durer dans ce sport :
- Intégrez la préparation mentale à votre entraînement quotidien (respiration, visualisation).
- Apprenez à gérer les médias : définir des limites, préparer vos interviews et savoir dire non.
- Investissez dans votre formation continue (anglais, management, finance) pour anticiper la vie après la carrière compétitive.
L’histoire de Becker rappelle que le talent suffit rarement à lui seul. La réussite durable exige un équilibre entre performance sportive, développement personnel et responsabilité sociale.